Des Lire d’été avec Sandra Todorovic – Partie 2

Rappel de présentation : Sandra Todorovic est une éditrice au grand coeur. ZTL, la maison d’édition qu’elle a créée propose des livres adaptés à chacun. Sa maison d’édition ZTL est à son image : humaine, touchante, chaleureuse et bienveillante.

Lisiane : As-tu un livre que tu as édité et qui t’as marqué plus qu’un autre?

Sandra : Alors il y en a un, mais c’est c’est purement affectif. Lorsque j’ai créé la maison d’édition, j’ai été soutenue par une amie qui collectionnait les petits bonhommes de pain d’épices. Son mari est mon premier imprimeur. Au moment où on a mis ce livre sous presse, cette amie est décédée. Ce livre là a un package affectif très lourd. Autrement non, à chaque projet, c’est une histoire d’amitié et une histoire de famille de coeur. On crée une famille autour de ce livre autour de ce travail qui est fait,

Lisiane : Nous n’en avons pas parlé mais comme cette maison d’édition peut être assimilée à une maison d’édition d’utilité publique. Reçois-tu des subventions?

Sandra : Non, malheureusement, je ne peux pas recevoir de subvention. J’ai reçu une aide par ma région pour la collection des 4 classiques. En effet, sur les 24 titres de mon catalogue, j’en ai quatre classiques.Tous les autres livres proposés sont des inédits. Pour les classiques, cela va des auteurs comme Jean de la Fontaine ou encore Perrault. Ce sont quatre oeuvres étudiées durant le cursus scolaire. J’avais une forte demande des enseignants sur ces titres là. J’ai donc déposé un dossier à la région afin de recevoir un apport financier. Les quatre ouvrages ont pu sortir en mentionnant l’aide de la région. Par contre, l’aide vient d’ailleurs. Elle vient de gens comme toi qui vont porter le message et aider à faire connaître ZTL. Le bouche à oreille est une aide précieuse. Je milite pour l’accessibilité de la lecture dans sa généralité. Pour une même lecture dans une classe, il faut des supports de lecture adaptés à chaque élève selon ses affinités et/ou difficultés. En cela, certains instituteurs font appels à la maison d’édition.

Lisiane : Est-ce que t’as eu des ots de lecteurs qui t’ont plus touché? Reçois-tu des dessins d’enfants par exemple?

Sandra : Tout le temps. C’est génial. J’ai fait un un salon ce week-end. J’ai rencontré deux familles qui sont venues et on a fait une photo ensemble. Ce sont des familles que je connais depuis très longtemps. Les enfants ont grandi avec les livres et c’est une sensation agréable et émouvante. Il y a aussi dans mon comité de lecture des enfants que j’avais aidés avant de monter ma maison d’édition. Ces enfants devenus grands font désormais partie de mon comité de lecture. J’ai aussi en mémoire une personne âgée qui s’appelle Marguerite. Un jour, elle est venue me trouver les bras grands ouverts, pleines de câlins pour me dire qu’à 88 ans, que grâce à mes livres, elle savait lire et lisait à sa petite fille. J’ai également beaucoup de gentils messages et plein de dessins d’enfants dans mon bureau. Des gentils mots de lecteurs ont aussi été déposés dans le livre d’or sur le site Internet de ZTL.

Lisiane : Tu as parlé d’un comité de lecture, en quoi cela consiste-t-il?

Sandra : Quand je travaille avec un auteur, au départ, je vais choisir le le texte et je vais le mettre de côté. Je vais attendre un moment pour ensuite le relire. Des fois, je relis un manuscrit au bout d’un mois, deux mois, voire trois mois. Il m’arrive de mettre du temps à revenir vers un auteur. L’interprétation d’un livre dépend de ton humeur et de ta situation du moment. Afin d’être la plus sincère et la plus objective,je vais m’autoriser à lire plusieurs fois ce texte à distance. Une fois que je suis vraiment sûre de moi car le texte m’a procuré de bonnes ondes et de bonnes sensations, je vais le soumettre à un premier comité de lecture composé de 10 personnes. En fonction du texte, la tranche d’âge des lecteurs du comité va varier. Je leur demande de remplir une petite grille de réponse par rapport à ce texte. Les membres du comité me transmette par la même occasion une note d’appréciation : de un à dix exprimant combien ont-ils aimé le livre? Cela n’a pas pour finalité d’émettre un jugement de l’auteur pour évaluer du degré d’appréciation de leurs lectures. Avec ce retour, nous faisons deux constats : soit il n’y a que moi qui me suis emballée et j’ai fait fausse route, soit les lecteurs partagent aussi mon enthousiasme. Je vais ensuite transmettre les remontées du comité à l’auteur. Je réitère par la même occasion ma demande de collaboration avec lui. Après modifications du manuscrit par l’auteur selon les remontées du premier comité de lecture, je vais l’envoyer à un 2ème comité de lecture qui sera composé d’orthophonistes, d’enseignants et de lecteurs lambdas et de lecteurs en difficulté. Ce deuxième comité, avec ses remontées, va mener à une 3ème version sur laquelle on va retravailler. En général, c’est sur cette 3ème version que l’on va partir pour une mise en édition.

Lisiane : Est-ce qu’il déjà arrivé de te montré enthousiaste sur une lecture et que le premier comité de lecture n’était pas de ton avis?

Sandra : Oui, cela m’est arrivé une fois. J’étais en mode : “Ah c’est génial!”. On peut travailler de telle façon sur le livre et on peut faire passer un message particulier via le récit proposé. Le comité de lecture était d’accord sur l’idée et sur le message à faire passer sauf que, pour eux, le texte n’était pas le plus adapté pour faire passer le message. Quand tu as dix personnes en face de toi qui te disent non, étant la minorité, cela te remets obligatoirement en question. La maison d’édition n’est pas assez grande pour prendre le risque de prendre un texte où je suis la seule à m’emballer.

Lisiane : Le public visé dans ta maison d’édition est un jeune public : des enfants, des jeunes, des ados. Est-ce que tu as des messages spécifiques par les livres à faire passer? Je pense, entre autres, à la prévention du harcèlement scolaire ou encore la lutte contre la discrimination.

Sandra : Oui. Les messages sont clairement affichés, comme dans “Dolly” évoquant le deuil animalier. Le deuil en général, c’est quelque chose de difficile à aborder avec les enfants et le deuil animalier animalier n’est quasiment pas abordé dans les livres jeunesse. “Dolly” n’est pas le livre que je vends le plus. Cependant, c’est le livre que je voulais avoir dans mon catalogue . Le sujet de la différence est également important. Si tu regardes la couverture du roman “Cette année-là”, tu verras que les enfants sur la couverture sont tous différents. On a un enfant qui est en fauteuil roulant, un autre enfant qui a la peau mate, également un enfant qui est mince, etc…Avec le comité de lecture, quand on travaille avec les enfants sur l’élaboration de la couverture, une fille m’a proposée de rajouter un enfant roux. En effet, pour elle, elle avait peu de personnages roux dans lequel elle pouvait s’identifier. Elle ne se reconnaissait pas dans Fifi Brindacier, Poil de Carottes ou encore Rebelle de Disney. Quand tu lis le livre, il n’y a aucune personne dans le livre qui roule, aucune personne qui est en fauteuil roulant. On a fait le choix de mettre en avant des qualités et non les traits physiques des personnages. Le message peut passer par le dessin, par exemple en couverture, et pas par le texte. C’est très important d’expliquer la différence à différents niveaux.

Lisiane : Nous allons malheureusement arriver à la fin de et entretien. Comme cet article fait partie de la série d’été du blog, je voulais savoir si tu avais un livre à conseiller pour l’été?

Sandra : Quand je lis, j’aime apprendre des choses. Du coup, je choisirais “Le secret d’Adèle” écrit par la journaliste Valérie Trierweiler. Elle explique à travers le tableau de Klimt Gustav, le tableau d’adèle qui était Adèle et comment ce tableau a été peint. Elle explique comment ce tableau a survécu à la guerre de 39-45. C’est une lecture passionnante. Le livre n’est pas long. Tout le travail de recherche autour de l’Autriche et du contexte historique se ressent dans la lecture. J’avais passé un bon moment en lisant. J’avais trouvé ça très vrai très bien écrit et très accessible.


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